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Dans les Hautes-Alpes, une station de ski abandonne ses remontées mécaniques pour la nature


À cheval entre 1 550 et 2 000 mètres d’altitude, la station de Céüze, nichée à proximité de Gap dans les Hautes-Alpes, amorce un tournant décisif. Face à un « enneigement devenu de plus en plus incertain », le site familial s’apprête à voir disparaître ses 25 pylônes, vestiges de huit téléskis désormais inactifs. Cette opération, confiée à une entreprise spécialisée, s’étalera sur près de deux mois.

La décision de retirer ces infrastructures n’est pas le fruit du hasard. Elle résulte d’un « choix mûri et partagé » après plus de dix ans de réflexion et de concertation, selon la communauté de communes Buëch-Dévoluy, gestionnaire du domaine. Ce long processus témoigne d’une volonté d’accompagner la transition du territoire tout en respectant les attentes locales.

Michel Ricou-Charles, président de la communauté de communes, insiste sur la complexité de cette démarche : « Il a fallu prendre le temps nécessaire à cette décision irréversible du démontage : à la fois sur le plan administratif, mais aussi d’un point de vue de l’acceptation sociale ». Malgré la fin du ski alpin, il rappelle que le massif conserve toute sa vitalité et refuse l’étiquette de « station fantôme ».

Transition écologique et reconversion des stations de ski

La station, qui accueille une dizaine de résidents à l’année, se réinvente autour des activités de pleine nature. Randonnée, raquettes, ski de randonnée, VTT et escalade sur ses falaises réputées deviennent les nouveaux moteurs de l’attractivité locale. Ouvert dans les années 1930, le domaine de Céüze 2000 avait cessé d’exploiter ses remontées mécaniques à l’issue de l’hiver 2017-2018, confronté à la raréfaction de la neige, à l’obsolescence du matériel et à la baisse de fréquentation.

Pour Nathalie Ghesquiere, gérante du gîte La Montagne, la disparition de ces structures était attendue : « C’est bien que ce soit démantelé, on attend ça depuis longtemps ». Elle souligne l’aspect inesthétique et peu écologique des installations abandonnées. « L’hiver, il y a plein de gens qui font du ski de rando, de la raquette », précise-t-elle, confiante dans la capacité du site à séduire les visiteurs, même si certains regrettent la fermeture du domaine skiable.

Démantèlement des remontées mécaniques et enjeux environnementaux

L’opération de retrait, dotée d’un budget de 137 000 euros voté en septembre 2024, a été précédée d’une étude approfondie sur la faune et la flore. L’objectif affiché est de « retirer de la manière la plus vertueuse toute source de danger ou de pollution induite par les anciennes installations », selon la communauté de communes. Ce chantier s’inscrit dans une démarche de restauration écologique du site.

L’association Mountain Wilderness, engagée depuis 2001 dans le démontage bénévole d’« installations obsolètes » et l’élimination de déchets liés à l’industrie du ski, a apporté son expertise. Jean Gaboriau, porte-parole de l’association, explique que les pylônes et matériaux seront héliportés pour éviter de dégrader le terrain, puis partiellement réutilisés ou recyclés, avec une estimation de 90 tonnes de ferraille.

« On se réjouit que la communauté de communes prenne en charge [le chantier]. On aimerait bien que ça fasse des petits, que ça essaime » dans d’autres sites, confie-t-il. Mountain Wilderness a déjà procédé au démontage d’une vingtaine d’installations similaires et recense plus d’une centaine d’autres structures abandonnées dans les massifs français, ainsi que de nombreux déchets industriels ou militaires.

Fermeture des micro-domaines skiables en France

En France, la fermeture définitive de 186 stations de ski, principalement des « micro-domaines », a été constatée depuis leur création, pour des raisons essentiellement économiques. Pierre-Alexandre Metral, doctorant en géographie à l’université de Grenoble, consacre sa thèse à ce phénomène, qui illustre la profonde mutation des territoires de montagne face aux défis climatiques et structurels.

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