Santé

Le cancer pourrait-il être identifié par l’odeur avant l’apparition des symptômes ?


La perspective d’un dépistage du cancer reposant sur l’analyse des odeurs corporelles, de l’urine ou des selles, gagne en crédibilité scientifique. Une équipe de chercheurs chinois a récemment démontré, à travers des expériences sur l’animal, que des composés chimiques volatils libérés par l’organisme pourraient constituer des marqueurs précoces de la maladie, bien avant l’apparition des premiers signes cliniques.

Le cancer ne se limite pas à une prolifération cellulaire désordonnée. Il induit également des perturbations métaboliques profondes, modifiant la chimie interne du corps. Ces altérations laissent des traces détectables, notamment sous forme de composés organiques volatils (COV), de petites molécules issues des processus biochimiques altérés par la tumeur.

Les COV sont présents dans l’air expiré, les fluides corporels et même les effluves cutanés. Chaque individu possède une empreinte chimique unique, susceptible d’être modifiée par la présence d’une tumeur. L’analyse de ces molécules, non invasive et rapide, pourrait révolutionner le dépistage, à condition de disposer de méthodes fiables pour interpréter ces signaux chimiques complexes.

Signatures chimiques et dépistage précoce du cancer

Pour explorer cette voie, des chercheurs de l’Académie chinoise des sciences à Hefei ont mené une étude sur des souris de laboratoire. Ils ont induit des tumeurs dans différents organes – poumon, foie, estomac, œsophage – et suivi trente animaux, répartis entre groupes malades et témoins sains. L’objectif : observer l’évolution des COV au fil du développement tumoral.

Sur une période de 21 semaines, les scientifiques ont recueilli à six reprises des échantillons d’urine, de selles et d’odeurs corporelles. L’analyse, réalisée par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse, a permis de détecter avec précision les variations des COV, sans cibler a priori un composé spécifique. Cette approche globale visait à identifier tout changement significatif entre les groupes.

Les résultats ont mis en évidence trois ensembles distincts de COV associés à la présence de tumeurs. Fait remarquable, ces signaux chimiques étaient détectables bien avant l’apparition de symptômes visibles ou de signes cliniques avancés. Chez les souris, des marqueurs spécifiques étaient présents dans l’urine dès la cinquième semaine, dans les odeurs corporelles à la treizième, puis dans les selles à la dix-septième semaine. Le métabolisme révélait ainsi la maladie à un stade précoce, inaccessible aux méthodes conventionnelles.

Chromatographie, spectrométrie et perspectives médicales

Cette avancée ouvre la voie à de nouvelles stratégies de dépistage. Si ces résultats étaient transposables à l’humain, il deviendrait envisageable de proposer des tests simples, non invasifs et peu coûteux pour détecter le cancer à un stade où les chances de guérison sont maximales. Un tel changement de paradigme permettrait de limiter le recours à des examens lourds et onéreux, tout en améliorant la prise en charge des patients.

Néanmoins, la transposition à la clinique humaine reste un défi. Le métabolisme humain présente une complexité bien supérieure à celui de la souris, et il sera crucial de vérifier la spécificité et l’universalité des COV identifiés. Les chercheurs insistent sur la nécessité de développer des protocoles standardisés et reproductibles, condition sine qua non pour tout futur test de dépistage basé sur ces biomarqueurs.

Métabolomique et révolution du diagnostic oncologique

Cette étude illustre l’essor de la métabolomique et des approches multiomiques dans la compréhension et la détection du cancer. La capacité à identifier la maladie à ses balbutiements, avant même l’apparition de symptômes ou d’anomalies détectables par l’imagerie, représenterait une avancée majeure pour la santé publique. À terme, une simple analyse d’urine pourrait suffire à sauver d’innombrables vies, bouleversant les pratiques actuelles du diagnostic oncologique.

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